Sujet : Paysage urbain et mobilité des rongeurs urbains réservoirs d’agents zoonotiques : une étude à Antananarivo, Madagascar.
Dates : mars 2023 – mars 2024
Encadrement CBGP : G. Dobigny
Université : Université de Tananarive

Contexte : L’éco-épidémiologie des zoonoses impliquant les micromammifères, notamment les rongeurs, a été relativement peu étudiée en milieu urbain. À Madagascar, la plupart des travaux de recherche et de contrôle se focalise sur les zones rurales, essentiellement en lien avec la peste. Pourtant, des épisodes épidémiques de peste et la détection récente d’autres agents pathogènes zoonotiques à fort risque sanitaire potentiel (ex. Rickettsia spp., Leptospira spp.) dans les villes malgaches, notamment à Antananarivo, suggèrent que les socio-environnements urbains méritent probablement une attention particulière.

Justification : En particulier, la biologie générale des micromammifères réservoirs en ville reste très peu documentée, notamment leur capacité de se déplacer dans le tissu urbain. Cette donnée est pourtant un prérequis fondamental pour décrire et comprendre les patrons et processus de circulation des pathogènes qu’ils véhiculent, donc le risque zoonotique associé.

Objectifs : La  présente thèse aura pour objectif d’explorer pour la première fois la mobilité des micromammifères impliqués dans l’écologie de pathogènes zoonotiques majeurs (ex. agents de la peste, du typhus et de la leptospirose) en lien avec des éléments caractéristiques du paysage urbain à Antananarivo.

Méthodologie : La rhodamine est un fluorochrome qui, une fois ingéré par les rongeurs, est détectable sous certaines longueurs d’onde dans leur bouche, leur tube digestif et/ou dans leurs poils une fois métabolisé. Elle a déjà été utilisé avec succès par les chercheurs de l’Unité Peste afin d’étudier les mouvements de rats noirs (principal réservoir sensible de la peste en milieu rural malagasy) entre les rizières, les haies de Sisal et les maisons (Rahelininirina et al., 2010). Afin de documenter cette fois l’ampleur des déplacements des micromammifères au sein du paysage urbain, des expérimentations de terrain seront menées à Antananarivo en deux temps : d’abord, des appâts marqués à la rhodamine seront déposés dans des sites présélectionnés (cf. plus bas), puis des sessions de capture seront organisées afin d’examiner si de la rhodamine est détectable chez les rongeurs piégés, signe qu’ils se seront déplacés entre le site d’appâtage et celui de capture. Il est prévu d’appliquer ce protocole pour explorer les éventuels mouvements de rongeurs (i) entre les marchés et les habitations environnantes, (ii) de part et d’autre des routes, (iii) autour des dépotoirs, (iv) autour des collecteurs d’eaux usées et (iv) entre les rizières et les habitations des bas-quartiers. Enfin, un dispositif en gradient sera utilisé pour évaluer (v) la distance que peuvent parcourir les animaux au sein des tissus d’habitations (i.e. entre habitations mitoyennes, des mêmes blocs, etc). L’ingestion de rhodamine sera vérifiée à l’aide d’une lampe UV à partir du tube digestif des rongeurs capturés, ainsi que via l’analyse de leurs poils et des vibrisses sous microscope à fluorescence.

Résultats attendus : À notre connaissance, les résultats obtenus seront totalement innovants. Nous faisons néanmoins l’hypothèse que les rongeurs se déplacent relativement peu au sein de blocs d’habitations homogènes (i.e. territoires restreints) et que leurs mouvements soient contraints par les infrastructures routières importantes mais favorisés par celles d’assainissement à ciel ouvert ou enterrées. Compte tenu des ressources alimentaires qu’ils abritent, les marchés pourraient être attractifs pour les rongeurs, induisant ainsi des mobilités entrantes. En revanche, les déplacements entre les rizières et les habitations des bas-quartiers (où les ressources alimentaires sont probablement abondantes également) restent totalement inexplorées et seront documentés pour la première fois